Ne pas s’habituer aux crimes de l’Etat d’Israël


A Gaza et en 48h, l’armée israélienne a tué les 4 et 5 mai dernier 25 Palestinien-nes dont deux femmes enceintes et trois enfants, et blessé au moins 154 personnes, et 4 Israéliens sont morts, touchés par des roquettes tirées de la bande de Gaza. Face aux bombardements indiscriminés de bâtiments civils (contraires à l’article 8 du Statut de Rome) dans un territoire sous blocus depuis bientôt 12 ans, la diplomatie européenne s’est contentée de dénoncer les tirs de roquette. Nous proposons un retour nécessaire sur le contexte à Gaza avec un article de Umit Cirak paru le 10 mai 2019 sur le site de la France Insoumise.

 

Après la flambée de violences de ces derniers jours à Gaza, un cessez-le-feu a été conclu entre Israël et les factions palestiniennes, selon ces dernières, après la mort de 25 Palestiniens et quatre civils en Israël. Il s’agit du pire bilan pour Gaza depuis 5 ans.

Le fait qu’il y ait des victimes des deux côtés de la frontière ne peut occulter une donnée structurelle : la cause fondamentale de ces violences est le siège de l’enclave de Gaza par l’Etat d’Israël. Les crimes de celui-ci ne se limitent pas aux meurtres commis par ses soldats sur des palestiniens même lorsqu’ils manifestent de manière pacifique comme lors de la grande marche du retour (195 morts). Ces crimes prennent également la forme de ce siège maintenant Gaza dans une situation proche du désastre humanitaire. Alors que la diplomatie Etats-Unienne est en osmose avec le criminel de guerre B.Netanyahou, de facto, les flambées de violences, les tirs de roquette, deviennent l’unique instrument pour tenter de négocier quelque chose face à un ennemi hésitant seulement sur la manière de détruire le peuple palestinien. Et les Gazaouis paient cela au prix fort, les bombardements israéliens, notamment par des drones, n’épargne personne -même les bébés de 14 mois telle que Sebba Mahmoud Abu Arar – dans l’une des zones les plus denses au monde. Il n’est donc pas possible, aujourd’hui comme hier, de tracer une ligne d’équivalence entre l’Etat d’Israël et le peuple palestinien. Notons que le dictateur sanguinaire égyptien, grand ami de la France qui lui fournit de l’armement, contribue à cette situation en limitant les entrées et sorties de Gaza.

Bien entendu, cette oppression touche d’abord le peuple palestinien en brûlant sa chaire et son violentant son esprit. Il est également vrai qu’une politique coloniale « décivilise » l’Europe et « l’ensauvage » comme l’écrivait Aimé Césaire, ce qui se traduit par la fascisation de la société israélienne, par un gouvernement d’extrême-droite, mais aussi par un parti d’opposition dont des leaders tel que Benny Gantz proclament leur fierté d’avoir ramené Gaza à l’âge de pierre lorsqu’il était chef d’état-major…

Toutefois, aujourd’hui, cette politique coloniale n’a pas des effets sur uniquement sur l’oppresseur colonial et l’opprimé colonisé. Elle en a aussi sur les sociétés tierces. Être informé de manière régulière que des territoires palestiniens ont été bombardés par Israël causant x nombre de mort-es porte le risque de rendre « normal » que des Palestiniens meurent et soient opprimés. Pour les masses les moins politisées, les officines de propagande sionistes cherchent à faire retomber cette situation sur l’opprimé, le Palestiniens. Ils parviennent plus généralement à obtenir une forme de désintérêt renvoyant dos à dos celui l’oppresseur et l’opprimé, l’habitude d’une « guerre » sans fin. Pour les plus politisés, le risque est grand qu’un soupir de regret pour les Palestiniens s’évapore dans un désert de résignation, que l’habitude s’installe aussi (avec une nuance d’indignation). Le risque est bien que nos yeux s’habituent à considérer que les cadavres des Palestiniens de 1 mois à 79 ans font partie du décor… Tout comme quelques kilomètres plus loin, il est désormais considéré comme faisant partie du décor que des Syriens meurent sous les barils de TNT du régime ou dans des geôles dont on ne sort jamais.

Ainsi, l’oppression coloniale brutale de l’Etat d’Israël nous corrompt aussi, tel un analgésique qui s’absorbe par les yeux, engourdit nos nerfs et nos cerveaux. S’habituer à une injustice d’une manière ou d’une autre, même en le regrettant, n’est ce pas à s’habituer un peu plus à toutes les injustices ?

Le concours de l’Eurovision, qui se tiendra le 18 mai prochain, sera un nouveau moment pour nous habituer à faire avec les victimes palestiniennes du crime de masse perpétré à quelques kilomètres de là. L’argument sur le fait que « tout cela n’est pas politique » ne sonnera jamais aussi faux. Et si nous condamnons les insultes homophobes dont il est l’objet, nous savons que Bilal Hassani, le candidat français à ce concours, ce pauvre tirailleur volontaire de la musique, participera lui aussi à cette opération de corruption en se prêtant à cette mascarade sordide.

Alors, il nous reste avant toute chose à ne pas habituer, à rester sur le pied de guerre, à continuer dénoncer à chaque fois et à appuyer les initiatives qui existent, notamment la campagne Boycott Désinvestissement Sanctions.

Umit Cirak

Cet article est paru le 10 mai 2019 sur le site de la France Insoumise : http://reflexions-echanges-insoumis.org/ne-pas-shabituer-aux-crimes-de-letat-disrael/

 

Le jour même de la parution de cet article, le vendredi 10 mai, lors de la nouvelle marche du retour organisée à Gaza, l’armée israélienne a assassiné un jeune Palestinien de 24 ans à Rafah, et en a blessé 30 autres par balles, selon un bilan provisoire transmis par Ziad Medoukh. Voilà ce que valent les promesses de cessez-le feu de Netanyahou après les bombardements massifs du week-end dernier.

 

Mais la population palestinienne ne cède pas. Elle poursuit les manifestations pour la levée du blocus et le droit au retour. Plus de 7.000 palestiniens de toute la bande de Gaza se sont rassemblés ce vendredi pour la 58ème semaine, et ceci malgré le Ramadan, dans la zone tampon décrétée unilatéralement et de manière parfaitement arbitraire par l’occupant israélien.

 

Le principal slogan était "Tous unis contre le plan de Trump", le fameux "deal du siècle" qui voudrait pérenniser l’ensemble des colonies illégales et annexer encore davantage de terres palestiniennes. Et personne n’est près d’oublier les déclarations des dirigeants qui, tel Macron, ont eu le culot de condamner les roquettes lancées par les Palestiniens contre l’occupant, sans un mot sur les bombardements des populations civiles, le week-end dernier à Gaza !

 

SOLIDARITE INTERNATIONALE !

LEVEE IMMEDIATE DU BLOCUS DE GAZA

RECONNAISSANCE DE L'ETAT DE PALESTINE !