Quand la France parle de la Palestine à l'ONU, mais n'agit pas beaucoup !


La répression coloniale n'a que trop duré en effet, alors que font les Nations Unies pour contraindre Israël à y renoncer ?
La répression coloniale n'a que trop duré en effet, alors que font les Nations Unies pour contraindre Israël à y renoncer ?

A l'ONU, la France, par la voix de son représentant permanent, François Delattre, dit "ça suffit" sur la situation en Palestine et Israël. Mais que fait elle concrètement pour changer la situation ? Elle ne propose pas la reconnaissance de l'Etat palestinien, elle ne demande pas la levée immédiate du blocus de Gaza, elle ne demande pas la libération des prisonniers politiques palestiniens, elle ne demande pas l'arrêt de la colonisation, elle déplore une victime israélienne mais ne déplore pas les dizaines de palestinien-nes blessé-es ou tué-es récemment...

 

Elle sait donner des conseils aux palestiniens mais ne demande pas à Israël de respecter le Droit International... Elle respecte trop l'Etat israélien pour le menacer de la moindre sanction économique même symbolique pour son non-respect des résolutions des Nations Unies, sans même parler d'appeler les autres Etats à peser de tout leur poids sur la politique coloniale du gouvernement israélien...

 

La France, elle parle, mais que fait-elle d'autre pour vraiment défendre les droits du peuple palestinien ?


Israël/Palestine : La situation n’a que trop duré

Situation au Moyen Orient
Intervention de M. François Delattre, représentant permanent de la France auprès des Nations unies
Conseil de sécurité - 20 juin 2017

Monsieur le Président,

Je voudrais tout d’abord remercier le Secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul-Gheit, le Coordinateur spécial des Nations Unies, Nikolay Mladenov, Lakhdar Brahimi en tant que membre des Elders et Michael Doran, directeur de recherche au Hudson Institute pour leurs interventions. Le tableau qu’ils ont dressé de la situation, tant en Israël et en Palestine que dans l’ensemble de la région, est très sombre.

Dans un environnement régional marqué par des crises nombreuses et meurtrières, le conflit israélo-palestinien se distingue par sa durée et son caractère structurant :

- sa durée d’abord : nous commémorerons cette année, dans quelques mois, les 70 ans du plan de partage que les Nations Unies ont porté à travers la résolution 181 de l’Assemblée générale, et qui a été immédiatement suivi de la première guerre israélo-arabe. Ce mois est aussi celui des 50 ans de la guerre de juin 1967 et de l’occupation des Territoires palestiniens et de Jérusalem-Est qui s’en est suivie. Cette période ne doit être pour nous ni un simple moment de souvenir, ni un exercice de résignation. Elle nous oblige à regarder vers l’avenir et à nous remobiliser ensemble.

- cela d’autant plus que la seconde caractéristique du conflit israélo-palestinien est bien son caractère structurant. L’absence de règlement de ce conflit, particulièrement grave en elle-même, constitue aussi une menace permanente pour la sécurité internationale. Par sa gravité, sa dimension symbolique et sa place dans l’imaginaire collectif, la portée de ce conflit non-réglé revêt un caractere structurant et dépasse largement les frontières d’Israël et des Territoires palestiniens. Toute escalade dans ce conflit est porteuse d’un risque de déstabilisation régionale incontrôlable. C’est pourquoi nous ne pouvons pas nous resigner à un faux statu quo qui cache en réalité une regression quotidienne sur le terrain comme dans les esprits. Le bout de ce chemin est clair : c’est la disparition de la solution à deux Etats, comme un mirage dans le désert, qui marquerait un saut dans l’inconnu et le risque du pire.

Monsieur le president,

Nous partageons tous le constat que la douloureuse situation actuelle n’a que trop duré.

Elle a trop duré pour les Palestiniens, qui se trouvent privés depuis trop longtemps de leur droit légitime à disposer de leur Etat par la poursuite de l’occupation, et qui voient cette perspective s’éloigner et disparaître avec le développement de la colonisation. Les annonces du début du mois portant sur près de 3 000 nouvelles unités de logement dans les colonies israéliennes de Cisjordanie s’inscrivent ainsi dans une tendance lourde : une augmentation de 70% des constructions dans les colonies sur l’année écoulée en comparaison de l’année précédente, selon les chiffres que vient de publier le bureau israélien des statistiques. Avec près de 600 000 colons à Jérusalem-Est et en Cisjordanie, nous approchons du point de non retour et la question de la possibilité d’une solution des deux Etats est posée, sans disposer pour autant de solution alternative. Il faut le rappeler : la colonisation est illégale en droit international et rend la paix impossible.

Mais cette situation a trop duré pour les Israéliens aussi : parce que la perspective d’une poursuite illimitée de l’occupation et de la colonisation contredit les fondements démocratiques de l’Etat d’Israël ; parce que leur pleine intégration régionale n’est possible qu’une fois la paix conclue avec les Palestiniens ; enfin, parce que la violence prospère sur l’absence de toute perspective politique. L’attentat survenu vendredi à Jérusalem, qui a coûté la vie à une jeune femme membre des forces de police israéliennes, et que la France a vigoureusement condamné, en est une nouvelle illustration tragique. Les cycles de violence se succèdent, en particulier à Jérusalem, et ne font qu’accroitre la défiance réciproque.

Pourtant, si le conflit israélo-palestinien est aujourd’hui le plus ancien de ceux qui déchirent le Moyen-Orient, c’est le seul dont la solution est connue et largement partagée au sein de la communauté internationale. Malgré la dégradation constante de la situation sur le terrain, les paramètres d’un futur accord n’ont pas changé : deux Etats vivant en paix et en sécurité le long de frontières sûres et reconnues ; des frontières tracées sur la base des lignes de 1967, avec des échanges de territoires mutuellement agréés ; Jérusalem pour capitale de ces deux Etats ; une solution concertée, réaliste, juste et équitable pour les réfugiés palestiniens.

Il n’y a pas d’alternative viable à la solution des deux Etats, ni pour les Israéliens, ni pour les Palestiniens. Les 50 années écoulées nous enseignent que les destins de ces deux peuples sont liés, et qu’aucun ne peut durablement satisfaire ses aspirations nationales en niant celles de l’autre.

Enfin, je veux exprimer une nouvelle fois les préoccupations de la France à l’égard de la situation qui prévaut dans la bande de Gaza. La crise humanitaire permanente dans laquelle est installé ce territoire s’est aggravée avec le blocage de la fourniture en électricité qui dure depuis environ deux mois. Les habitants de Gaza vivent aujourd’hui avec 2 à 4 heures d’électricité par jour en moyenne, et la crise énergétique a des conséquences graves pour les infrastructures médicales, sanitaires et de traitement de l’eau en particulier.

Il est donc nécessaire d’œuvrer à l’amélioration de la situation à Gaza, tout particulièrement sur le plan humanitaire. Toutes les parties prenantes doivent prendre leurs responsabilités pour qu’une solution durable soit trouvée à Gaza.

Il y a urgence. Si rien n’est fait, les tensions en cours pourraient aboutir à un nouveau conflit meurtrier, comme la bande de Gaza en a connu 3 au cours des 9 dernières années. Nous ne pouvons nous le permettre. Israël doit donc jouer le rôle qui lui revient, en allégeant les restrictions imposées à l’accès des biens et des personnes de et vers Gaza – prélude à une levée du blocus qui devra, évidemment, être assortie de robustes garanties de sécurité.

Il est aussi fondamental que les Palestiniens parviennent à un accord de réconciliation car nous savons qu’il n’y aura pas d’Etat palestinien viable sans unité palestinienne sur les fondamentaux de la solution des deux Etats.

Monsieur le Président,

La France est l’amie des Palestiniens comme des Israéliens. C’est pourquoi elle peut leur tenir un langage de vérité, en les appelant inlassablement à revenir à la table des négociations. Et c’est pourquoi mon pays ne baissera jamais les bras. Nous souhaitons continuer à agir en ce sens avec nos principaux partenaires :
- dans la région, l’initiative arabe de paix reste un cadre incontournable pour faire de la paix avec les Palestiniens le premier pas vers une intégration régionale d’Israël.  
- Nous voulons espérer que l’engagement de l’administration américaine dans un nouvel effort diplomatique aidera à relancer, comme nous le souhaitons, une dynamique de négociation entre Israéliens et Palestiniens.
- Avec nos partenaires de l’Union Européenne, nous restons à la pleine disposition des parties pour aider à la reprise des négociations.

Monsieur le Président,

50 ans d’occupation, cela signifie deux générations successives de Palestiniens et d’Israéliens qui ont vécu dans la situation que nous connaissons. Cette situation est dévastatrice sur le terrain comme elle l’est dans les esprits. Il est temps d’y mettre un terme.

Je vous remercie.