Washington ne considère plus les colonies israéliennes contraires au droit international


 

Au moment précis ou Benjamin Netanyahou, son allié le plus fidèle dans la région,  connait les plus grandes difficultés politiques et judiciaires auxquelles il a dû faire face durant ses 15 années de règne, Donald Trump, n'hésite pas pour voler à son secours à prendre une nouvelle décision spectaculaire en rupture totale avec la tradition diplomatique américaine et le droit international.

 

L’administration de Donald Trump a donné, lundi 18 novembre, un nouveau coup de canif au consensus international sur le conflit colonial subit par les Palestiniens, en annonçant que les Etats-Unis ne considéraient plus comme illégales les colonies de l’Etat hébreu en Cisjordanie occupée.

 

Un nouveau coup de canif ressenti comme un véritable coup de poignard dans le dos par les Palestiniens. 

 

Après la reconnaissance unilatérale de Jérusalem comme capitale d’Israël et celle de la souveraineté de l’Etat hébreu sur le Golan syrien, il s’agit d’une nouvelle décision spectaculaire en rupture avec la tradition diplomatique américaine, aussitôt saluée par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et dénoncée par l’Autorité palestinienne. Pour Mike Pompéo, le chef de la diplomatie nord-américaine : « Après avoir examiné soigneusement tous les arguments de ce débat juridique », l’administration Trump conclut que « l’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international ». Faisant explicitement référence à ce que racontait déjà Ronald Reagan dans les années 80...

 

C'est le sacre politique par les USA du fait accompli et des coups de boutoir colonialistes avec la création progressive mais permanente de nouvelles colonies en Cisjordanie par Israël. Peu importe, que ces colonies soient synonymes de confiscations de terres, d'expulsion de centaines de personnes, de détournement des réserves d'eau et s'accompagne d'une répression féroce contre ceux qui osent s'y opposer ! Ce que les Palestiniens considèrent comme la NAKBA QUI CONTINUE...

 

Autrement dit, pour l'Administration nord-américaine, le Droit international n'existe officiellement en Cisjordanie. Pourtant les colonies installées sur les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 sont depuis jugées illégales par l’ONU, et une grande partie de la communauté internationale voit en elles un obstacle majeur à la paix.

 

Aujourd'hui, même le Canada qui d'habitude suit aveuglément les USA dans leurs choix diplomatiques s'est désolidarisé de ce nouveau positionnement. Son représentant a voté le 19 novembre pour une résolution quasi-unanime des Nations Unies en faveur du droit des Palestiniens à l'autodétermination.

Les états qui ont voté contre cette résolution sont Israël, les États-Unis et trois micro-états du Pacifique qui dépendent fortement de l'aide américaine et votent systématiquement avec Washington à l'ONU : les Îles Marshall, Nauru et les États fédérés de Micronésie.

 

Mais, faut-il rappeler que le Conseil de sécurité des Nations Unies, seule instance internationale à pouvoir infliger des sanctions à un Etat qui ne respecte pas le Droit international est composé de quinze membres. Parmi eux, cinq le sont de manière permanente et disposent d'un droit de veto (Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie). On n'est donc pas près de voir les représentants nord-américains accepter la moindre sanction contre la colonisation israélienne de la Cisjordanie... qu'ils cautionnent dorénavant tout à fait officiellement !


Parmi les nombreuses réactions suscitées par cette nouvelle agression impérialiste contre la Palestine occupée, car c'est bien de cela qu'il s'agit, nous retiendrons celle de l'AFPS bien sûr, mais aussi celle d'Amnistie International. 

 

Pour l'AFPS :

Donald Trump et Benyamin Nétanyahou : plus vite, plus haut, plus fort dans la violation du droit !

 

Lundi 18 novembre, Mike Pompeo, le secrétaire d’État des États-Unis a déclaré que « l’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international ». On se demande comment Mike Pompeo a pu en arriver à une telle conclusion. « L’établissement de civils israéliens en Cisjordanie » - territoire palestinien occupé par Israël - correspond précisément à la définition de l’établissement de colonies. La 4ème convention de Genève définit la colonisation comme un crime de guerre. Un crime de guerre ne serait pas contraire au droit international ?

 

En décembre 2017, Donald Trump inaugurait son entreprise de liquidation des droits nationaux du peuple palestinien en reconnaissant Jérusalem comme capitale d’Israël en contradiction avec les résolutions de l’ONU. S’en suivit le désengagement des États-Unis dans le financement de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens et de bien d’autres programmes notamment en matière de santé. Les États-Unis étaient ainsi passés de l’impunité accordée à Israël au soutien inconditionnel à toutes ses politiques coloniales, d’apartheid, et de conquête de territoires par la force.

 

Avec le feu vert marqué par l’élection de Donald Trump, ces dernières années furent donc logiquement marquées par l’accélération de la répression envers les Palestiniens et spécialement la jeunesse, les massacres perpétrés particulièrement contre la population de Gaza, l’accélération de la colonisation (confiscation de terre, construction de logements, construction d’infrastructures réservées aux colons), des destructions de maisons, des transferts forcées de population... Sans oublier le vote de lois liberticides niant les droits nationaux du peuple palestinien tout en faisant de la colonisation une valeur nationale de l’État d’Israël.

 

Autant de violations avérées du droit international sans que le moindre acte ne soit posé par la « communauté internationale » pour dire STOP à Benyamin Nétanyahou.

 

En toute logique, Trump déroule le tapis rouge à un Nétanyahou empêtré dans des démêlés judiciaires et dans une impasse politique. Il n’a pas fallu 24 heures à Nétanyahou pour faire avancer un projet de loi demandant à Israël d’annexer la vallée du Jourdain !

 

Combien de temps les autres membres du Conseil de sécurité de l’ONU vont-ils regarder passer ce train infernal sans réagir ? Combien de temps vont-ils accepter d’être ridiculisés et de voir partir en fumée l’avenir d’un peuple ? Combien de temps l’Union européenne et la France vont-elles se contenter de déclarations sans lendemain ?

 

Si la France veut être cohérente avec la politique qu’elle affirme, si elle veut sortir de l’impuissance, si elle ne veut pas se rendre complice de ce déni du droit, elle doit reconnaître immédiatement l’État de Palestine dans les frontières d’avant juin 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale.

 

Elle doit rappeler que la colonisation est bien un crime de guerre, et que toute acquisition de territoire par la force est contraire à la charte de l’ONU.

Elle doit exiger, au niveau européen, des sanctions effectives contre l’État d’Israël qui continue d’agir en toute impunité.

 

Le Bureau national de l’AFPS, 20 novembre 2019


Pour Amnesty International : 

L’annonce de Mike Pompeo sur les colonies israéliennes accroît les risques pour les Palestiniens dans les territoires palestiniens occupés

 

En réaction à l’annonce du Secrétaire d’État des États-Unis Mike Pompeo, qui a déclaré que les États-Unis ne considèrent plus les colonies israéliennes en Cisjordanie comme illégales au titre du droit international, Philippe Nassif, directeur du plaidoyer pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à Amnesty International, a déclaré :

 

« Aujourd’hui, le gouvernement des États-Unis a annoncé au reste du monde qu’il pense que les États-Unis et Israël sont au-dessus des lois et qu’Israël peut continuer de violer le droit international et les droits fondamentaux des Palestiniens, les États-Unis lui apportant leur ferme soutien.

« Cette annonce ne modifie et ne modifiera pas la loi qui est tout à fait limpide : la construction et le maintien des colonies en Cisjordanie occupée, notamment à Jérusalem-Est, enfreignent le droit international et s’apparentent à des crimes de guerre. Toutefois, cela fait courir des risques accrus aux Palestiniens en Cisjordanie occupée, y compris à Jérusalem-Est, en donnant à Israël le feu vert pour poursuivre sa politique d’implantation et d’expansion des colonies qui se trouve au cœur de la crise des droits humains dans la région.

« L’annonce des États-Unis va à l’encontre du consensus international sur l’illégalité des colonies israéliennes, mais aussi de l’obligation légale qui incombe aux États-Unis de respecter et de faire respecter les Conventions de Genève.

« Nous n’avons pas peur de dire clairement et sans ambiguïté : aucune annonce des États-Unis ne peut modifier la loi et nous continuerons d’œuvrer afin que le droit international et les droits humains soient respectés et protégés, et que les auteurs présumés de violations soient amenés à rendre des comptes. »

 

Informations générales et contexte

 

La situation dans les territoires palestiniens occupés est principalement régie par deux régimes juridiques internationaux : le droit international humanitaire (notamment les règles du droit relatif à l’occupation) et le droit international relatif aux droits humains. Le droit pénal international s’applique également, car certaines violations graves sont susceptibles de constituer des crimes de guerre.

 

La politique israélienne qui consiste à installer ses civils dans les territoires palestiniens occupés et à déplacer la population locale viole les dispositions fondamentales du droit international humanitaire.

 

Tous les États parties à la Quatrième Convention de Genève, y compris Israël et les États-Unis, sont tenus de « veiller au respect » de la Convention. Cette obligation est largement interprétée comme nécessitant une action positive de la part des États individuels. Tous les États sont également tenus au titre du droit international coutumier de ne pas conférer de reconnaissance à une situation illégale, comme celle créée par les colonies israéliennes en Cisjordanie.

 

Amnesty International demande à Israël de cesser immédiatement toute activité de colonisation à titre de première mesure, en vue de démanteler toutes les colonies israéliennes et les infrastructures liées dans les territoires palestiniens occupés et de réinstaller les civils israéliens vivant dans ces colonies en dehors des territoires palestiniens occupés.