Le droit au retour, clef pour la paix en Palestine


Pour qui considère que la question du droit au retour des réfugiés palestiniens est un élément central à résoudre pour donner une chance de construire un réel processus de paix entre le peuple palestinien et l'occupant israélien, le texte qui suit va certainement devenir une référence... Il vient d'être publié par le magazine en ligne Orient XXI qui une fois de plus prouve la qualité du travail éditorial de son équipe. Qu'elle en soit vivement remerciée par exemple par un soutien financier dont vous trouverez le mode d'emploi à la fin de cet article.

 

TRIBUNE

Le droit au retour, clef pour la paix en Palestine

par  ILAN PAPPE - URI DAVIS - TAMAR YARON

 

https://orientxxi.info/magazine/le-droit-au-retour-clef-pour-la-paix-en-palestine,4032 

 

Le « processus de paix » qui avait abouti aux accords d’Oslo en 1993 a échoué pour avoir ignoré deux questions essentielles : la nature de l’État d’Israël et celle du droit au retour des Palestiniens expulsés en 1948. Pourtant, en 2005, un rapporteur spécial des Nations unies, Paulo Sérgio Pinheiro, définissait des « principes » sur la restitution des logements des personnes expulsées ou déplacées. Précis et détaillés, ils méritent d’être relus à la lumière de la passivité persistante de la communauté internationale sur les droits des Palestiniens.

 

L’actuel « processus de paix », qui a débuté quelques années après la guerre de 1967 pour aboutir aux accords d’Oslo en 1993, est dans l’impasse. Toutes les tentatives pour le faire progresser, y compris « le deal du siècle » ou, si l’on préfère, « le vol du siècle », ont échoué lamentablement. Depuis l’invention du « processus de paix », les efforts diplomatiques ont ignoré deux questions essentielles qui sont les principales raisons de sa disparition : d’une part, la question de la nature du sionisme et, d’autre part, celle du droit au retour des Palestiniens. Si on ne les traite pas, il n’y aura pas de véritable progrès vers la réconciliation et une paix juste.

 

RECONSIDÉRER LE SIONISME ET SES CRIMES

De récentes études sur la Palestine ont présenté le sionisme comme un mouvement colonialiste de peuplement. Il s’agit d’une ancienne conceptualisation de la question de Palestine, proposée pour la première fois par Maxime Rodinson dans son texte phare, « Israël, fait colonial ? » (Les Temps modernes, no 253 bis, juillet 1967), et avant lui par des universitaires palestiniens. Pendant des années, l’étude du colonialisme de peuplement était abordée dans une perspective idéologique, mais grâce à de nouvelles recherches, il est désormais possible d’examiner le sionisme en tant que colonialisme de peuplement dans une perspective académique. Cette évolution conduit à débattre du sionisme et de sa nature en les situant au cœur du conflit actuel sur le territoire de la Palestine historique.

 

Si comme l’avait suggéré très tôt Uri Davis en 1987 dans Israel : An Apartheid State (Londres, Zed Book), l’idée qu’Israël est un État d’apartheid est toujours rejetée dans certains milieux universitaires, cette notion est plus que jamais admise par la communauté académique. Il est difficile de ne pas définir Israël comme un État d’apartheid alors qu’aujourd’hui encore, en se fondant sur sa législation parlementaire, il désigne 93 % de son territoire comme étant réservé aux seuls juifs.

 

Une telle perspective permet de mieux voir, historiquement, comment est né le problème des réfugiés palestiniens et comment il s’est développé. Qualifier le sionisme de colonialisme de peuplement et Israël d’État d’apartheid conduit aussi à s’interroger pour savoir si le terme de « génocide » est légitime en la matière.

 

COLONIALISME DE PEUPLEMENT ET GÉNOCIDE

Le colonialisme de peuplement sioniste était le fait de colons européens qui fuyaient les persécutions en Europe et arrivaient sur des terres occupées par d’autres personnes qu’ils convoitaient pour eux-mêmes comme leur nouvelle patrie. Leur principal obstacle sur la voie de la création d’une Europe éloignée de l’Europe qui n’avait pas voulu d’eux était de se débarrasser de la population autochtone. Le regretté Patrick Wolfe avait attiré l’attention sur les logiques qui animent les mouvements coloniaux de peuplement, tel que le sionisme, lorsqu’ils se trouvent en présence d’une population indigène. Il affirmait qu’en pareil cas, ces mouvements étaient motivés par une logique qu’il a définie comme étant celle de « l’élimination de l’indigène »1.

 

L’élimination a souvent été synonyme de génocide, comme dans le cas des peuples autochtones d’Amérique du Nord et d’Australie. En Afrique du Sud, elle a pris la forme d’un apartheid, d’un nettoyage ethnique et d’autres mesures de répression. En Palestine, le nettoyage ethnique a été le principal moyen de mettre en œuvre cette logique qui a conduit à l’expulsion de la moitié de la population et des villages de Palestine, à la destruction de son espace urbain et à l’occupation de près de 80 % du pays. 2

 

Jusqu’à aujourd’hui, même les observateurs critiques ont hésité à appliquer le terme de « génocide » aux politiques israéliennes à l’encontre des Palestiniens. Cependant, si on admet que les réfugiés palestiniens et leurs descendants sont victimes de la logique de « l’élimination de l’indigène », ils sont en tant que tels également victimes d’une politique génocidaire.

Une telle référence est justifiée si on considère les définitions du génocide des Nations unies. La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide des Nations unies de 1948, est une convention contraignante qui a été adoptée par la Knesset. Elle précise qu’un acte génocidaire est « l’un des actes suivants commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, en tant que tel “y compris” “causer” des dommages corporels ou mentaux graves aux membres du groupe ».

 

La nature du sionisme et le droit au retour sont des questions liées entre elles. Notre propos ici est de dépasser la présentation des Palestiniens comme étant les victimes d’un seul acte génocidaire en 1948, mais de les présenter plutôt comme la cible d’une politique de dépossession continue qui comporte des aspects de pratiques génocidaires. Patrick Wolfe a suggéré de considérer le colonialisme de peuplement non pas comme un événement, mais comme un processus. Si le nettoyage ethnique de 1948 est présenté comme un acte génocidaire, alors la poursuite des politiques de dépossession relève de la même logique « d’élimination de l’indigène ». Ces politiques d’élimination perdurent parce que l’opération de 1948 a été incomplète en raison de la résistance des Palestiniens.

 

La dépossession structurelle ne se résumait pas à un acte de nettoyage ethnique, mais s’inscrivait dans des politiques génocidaires menées immédiatement après la fin de la catastrophe de 1948 (la Nakba palestinienne). Elle a commencé par l’expropriation officielle par Israël des biens et possessions des réfugiés par la « loi sur les biens des absents » de 1950 et par d’autres lois et législations israéliennes ultérieures. De plus, les autorités ont expulsé d’autres villages palestiniens entre 1948 et 1956, accroissant ainsi le nombre de réfugiés. 3

 

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